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Espace Etudiant
Cours de Bactériologie Médicale
GENRE BRUCELLA
Objectifs du cours :
- Connaître les principales pathologies provoquées par les Brucella
- Connaître les principaux hôtes de prédilection par rapport à l'espèce bactérienne
- Connaître les principaux critères bactériologiques conduisant au diagnostic de la maladie humaine
- Connaître les autres possibilités de diagnostic indirect et leur intérêt
- Connaître les antibiotiques actifs in vivo.
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A - INTRODUCTION
La brucellose, maladie au cent visages, est une anthropozoonose transmise à partir de diverses espèces animales à l'homme qui est un hôte accidentel, soit par voie cutanéo-muqueuse (contact avec un animal infecté ou un objet contaminé) soit par voie digestive (ingestion d'aliments contaminés tels produits lactés, fromages.......).
Seules 4 espèces sont pathogènes pour l'homme : B. melitensis (transmise surtout par les caprins et les ovins), B. abortus (bovins), B. suis (porcins) et B. canis (canins). Certaines professions étant particulièrement exposées tels agriculteurs, éleveurs, vétérinaires et personnel dabattoir, il sagit dune maladie professionnelle à déclaration obligatoire en France.
Cette anthropozoonose a des répercussions importantes aussi bien pour la santé publique que pour l'économie de la plupart des pays en voie de développement. La maladie animale a été maîtrisée dans nombre de pays développés ayant entraîné une diminution du nombre de cas humains.
Sa survenue chez l'homme dépend en grande partie du réservoir animal et la plus forte incidence d'infection chez lhomme a lieu si l'infection existe chez le mouton et la chèvre.
Enfin c'est un agent potentiel du bioterrorisme:http://www.2m2.fr/jni/letexper/09crssa1/cavallo.htm
B - HISTORIQUE
David BRUCE isola en 1887 cette bactérie de la rate de soldats britanniques décédés de la "fièvre de Malte" ou fièvre de l'Ile.
Ce germe reçut l'appellation de "Micrococcus melitensis".
Wright en 1897 démontra la présence d'anticorps agglutinants dans le sérum des malades. |
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C- HABITAT - POUVOIR PATHOGENE NATUREL
Très nombreuses espèces animales, domestiques ou sauvages sensibles: bovins, ovins, caprins, porcins, carnivores, lagomorphes, rongeurs mais aussi chevreuil, caribou, renne, bison et même le dauphin ou autres mammifères marins.....
http://www.cdc.gov/ncidod/EID/vol9no4/02-0576.htm
Il s'agit d'une maladie essentiellement animale (zoonose) avec l'existence d'hôtes animaux préférentiels ou de prédilection:
B. melitensis |
chèvres, moutons |
B. abortus |
bovins |
B. suis |
porcs, lièvres |
B. canis |
chiens |
La brucellose animale est est essentiellement une maladie de la reproduction :
- chez le mâle; épididymites, orchites, stérilité
- chez la femelle: atteinte de l'utérus, infection du foetus et avortement.
En-dehors de la gestation, l'infection peut être asymptomatique.
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SURVIE- RESISTANCE : Plusieurs mois dans les conditions naturelles (lait, fromages, fèces, sol, eau, mur des étables), d'où des conséquences pratiques sur la contamination.
Mode de transmission chez lhomme :
- Contact direct (pénétration du germe par voie cutanée ou muqueuse favorisée par des blessures ou des excoriations) avec des animaux malades par les carcasses ou mieux, produits davortement (placenta, sécrétions vaginales) ou encore par contact accidentel au laboratoire avec des prélèvements (hémocultures
).
- Ingestion daliments contaminés (lait et produits dérivés non pasteurisés, plus rarement crudités contaminées par du fumier ou exceptionnellement viande insuffisamment cuite). Les mains contaminées par un produit souillé peuvent entraîner exceptionellement une contamination par voie digestive.
- Inhalation de poussière de litière, daérosol contaminé dans un laboratoire, un abattoir ou encore dans une étable vide à cause de la transhumance.
La transmission inter-humaine reste exceptionnelle.
En France, maladie à déclaration obligatoire n°16: tout cas présentant des signes cliniques de brucellose associés à un isolement positif de Brucella ou à une séroconversion sérologique (BEH......).
Brucellose humaine : ANTHROPOZOONOSE < 200 cas/ an
Contamination
- directe 70 % professions agricoles
- indirecte 30 %
Incidence
- B. melitensis : 70 %
- B. abortus : 30 %
- B. suis: quelques cas
- B. canis: inconnue en France
Maladie humaine :
Maladie au cent visages : Fièvre méditerranéenne, fièvre de Malte, fièvre ondulante, mélitococcie. Après 1-4 semaines d'incubation (inoculation conjonctivale, pharyngée, cutanée, diffusion lymphatique vers un ganglion avec une multiplication puis essaimage dans la circulation générale avec septicémie puis métastase(s) (Brucellose focalisée).
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Plusieurs phases sont individualisées :
- Primo-invasion aiguë (brucellose aiguë septicémique ou fièvre sudoro-algique): syndrome grippal banal ou encore il sagit de la fièvre ondulante sudoro-algique de début insidieux associée à des myalgies, arthalgies saccompagant de sensations de malaise.
- Phase secondaire (brucellose sub-aiguë focalisée, cf figure ) avec constitution de foyers isolés ou multiples tels ostéo-articulaire (spondylodiscites, atteinte sacro-iliaque), hépatosplénique, méningite, endocardite, ou encore orchi-épididymite.
- Phase tertiaire (brucellose chronique ou état d'hypersensibilité) avec une expression double comme une symptomatologie générale de type asthénie et/ou polyalgies ou encore une symptomatologie plus focale par évolution torpide des foyers.
La mortalité est faible (< 5%), même en labsence de traitement.
D - EPIDEMIOLOGIE
- La brucellose est de répartition mondiale avec la notion de prédominance pour le bassin méditerranéen, ou encore lAsie de lOuest....
- En France, lincidence de cette maladie chez lhomme a beaucoup diminué depuis deux décennies avec un nombre moyen de cas annuel déclarés < 100. Cette diminution est liée à celle de la maladie animale.
Linfection prédomine dans les régions de montagne. Sagissant dune maladie professionnelle, les personnes à risque sont certains professionnels, doù une prédominance masculine.
Une étude récente sur 673 cas déclarés aux autorités sanitaires de 1990 à 1994 confirme les aspects suivants:
La brucellose est localisée au sud-est du pays, en particulier la Haute-Corse, les Hautes-Alpes, mais aussi le Cantal ........ Doù la notion de zone montagneuse.
http://www.invs.sante.fr/beh/1996/9634/
Dernier rapport : http://www.invs.sante.fr/publications/default.htm, maladies infectieuses à déclaration obligatoire, pages 199 à 201, 2003.
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Lors de contamination professionnelle, la proportion de femmes est de 15,2 % avec 50 % pour le personnel de laboratoire. Parmi les 467 cas, 1/3 des personnes exercait une profession à risque: agriculteurs, éleveurs ou bergers, personnel des abattoirs, bouchers, transporteurs ou encore vétérinaires.
Les modes de contamination sont variés. |
65 % des personnes atteintes sont de sexe masculin, 34,9 % de sexe féminin avec une moyenne dâge de 42 ans (+ ou - 17 ans).
Lexistence de cas groupés entraîne une enquête. Brucella peut être une arme biologique avec une dissémination par aérosol, scénario le plus probable.
E- PHYSIO-PATHOGENIE
Les Brucella pénètrent l'organisme par plusieurs voies: cutanée, digestive ou respiratoire, puis gagnent par voie lymphatique le premier relais ganglionnaire. Elles se multiplient et disséminent dans tout l'organisme par voie lymphatique et sanguine (bactériémie). Ces germes sont phagocytés plus ou moins rapidement par les macrophages puis détruits avec libération d'antigène et d'endotoxine. Ce sont des parasites intracellulaires facultatifs du système réticulo-histocytaire (splénomégalie, hépatomégalie).Il y a réponse immunitaire par production d'anticorps permettant le sérodiagnostic de la maladie. Leur rôle protecteur semble réel mais secondaire par rapport à l'immunité cellulaire.
- L'immunité à médiation cellulaire est essentielle pour la défense de l'organisme contre l'infection. Les lymphocytes T renforcent l'activité bactéricide des macrophages qui détruisent les Brucella au sein d'un granulome spécifique. Leur persistance intramacrophagique entretentient un état d'hypersensibilité retardée participant aux effets de la brucellose tertiaire ou chronique.
F - DIAGNOSTIC
Si le diagnostic sérologique est le plus fréquent, seul le diagnostic bactériologique par culture et isolement de la souche apportera la certitude.
DIAGNOSTIC BACTERIOLOGIQUE
Ne pas oublier d'indiquer au biologiste votre suspicion, s'il y a lieu
Prélèvements:
- Forme sudoro-algique : hémoculture (la bactériémie est continue)
- Forme focalisée: LCR, pus, liquide articulaire, ganglion...
Milieux : enrichis, à incuber à 37°C et sous C02 + (B.abortus) au moins 15 jours
L'usage de milieux liquides est habituel et la modalité de Castaneda (milieu biphasique) est inutile.
ATTENTION AUX RISQUES DE CONTAMINATION
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PRINCIPAUX CARACTERES BACTERIOLOGIQUES
Morphologie : Coccobacilles à Gram-négatif 0,5-0,7 X 0,6 à 1,5 µ
Non capsulés, immobiles et non sporulés
Caractères de culture : Poussent pauvrement et lentement sur les milieux habituels tels milieux pour hémoculture ou gélose chocolat > 2 jours à 37°C
Certaines espèces et biotypes sont exigeantes en gaz carbonique (CO2)(B. abortus).
L'orientation diagnostique rapide, outre la culture lente et l'aspect des colonies, est fondée sur le caractère oxydase + et uréase + puis sur une agglutination rapide sur lame (antigène A ou M).
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DIAGNOSTIC INDIRECT: SERODIAGNOSTIC-ALLERGIE
1 - Séroagglutination en tube (sérodiagnostic de Wright) cf WIDAL-FELIX, deux suspensions de germes avec A ou M prédominant sont utilisées.
Dès le 10e jour, les agglutinines apparaissent puis suivent une cinétique jusqu'au 5-6e mois. Intérêt dans la brucellose aiguë et sub-aiguë, agglutination complète au 1/80e, autre examen: 1 - 2 semaines plus tard.
Mauvaise spécificité : V. cholerae, Y. enterocolitica 09, tularémie
http://www.cdc.gov/ncidod/eid/vol5no5
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2 - Epreuve à l'antigène tamponné = test au rose Bengale ou épreuve à l'antigène tamponné (EAT, variante d'agglutination)
Interprétation similaire mais cinétique des anticorps plus longue que celle du sérodiagnostic de Wright
3 - Autres épreuves sérologiques si brucellose sub-aiguë et chronique: Immunofluorescence, test de Coombs, déviation ou fixation du complément.
CINETIQUE D'EVOLUTION DES ANTICORPS
4 - Intradermo-réaction à la mélitine (Burnet) : Cette épreuve d'hypersensibilité retardée est peu utilisée en l'absence actuelle d'allergène facilement disponible dans le commerce. La réaction est précoce (lecture après 24 h d'une réaction locale et quelquefois générale). Rechercher oedème, érythème, longue persistance de la positivité.
L'intérêt des tests diagnostiques varie en fonction de la forme de la maladie.
G - SENSIBILITE AUX ANTIBIOTIQUES
Antibiogramme limité à quelques antibiotiques, attention à la contamination de laboratoire.
Les Brucella sont sensibles in vitro à de nombreux antibiotiques dont les ß-lactamines mais on aura à l'esprit qu'il s'agit de parasites intracellulaires facultatifs.
In vivo, le traitement antibiotique est actif dans les formes aiguë et sub-aiguë ou focalisée après un temps de traitement suffisamment long pour les associations suivantes: tétracycline + streptomycine, doxycycline + rifampicine et, à un moindre degré, triméthoprime-sulfaméthoxazole. Traitement de plusieurs semaines (4-8).
http://www.2m2.fr/jni/letexper/09crssa1/cavallo.htm
Désensibilisation dans la forme chronique, difficile à obtenir en raison de l'approvisionnement difficile en allergène.
Ce cours a été préparé par le Professeur A. PHILIPPON (Faculté de Médecine COCHIN-PORT-ROYAL, Université PARIS V)(30.04.03)
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